mardi 1 avril 2008

Bienvenue au Zimbabwe

C’était en Russie il y a 9 mois, au début du voyage, à Souzdal, nous discutons avec un étranger, un blanc originaire du Zimbabwe. Comme nous lui disons que nous visiterons son pays dans quelques mois il se rembrunit, nous explique dans une mélange de colère et de tristesse qu’il ne veut plus entendre parler de cet endroit où ses parents fermiers ont été assassinés, c’est pourquoi il émigre en Russie…

Nous avons eu bien des hésitations avant de finalement confirmer notre venue au Zimbabwe.

Nous avions acheté les billets avec des miles « Star Alliance (Lufthansa) », le système fonctionnant par zones géographique, comme nous partions de Sao Paulo pour arriver dans la zone d’Afrique australe, autant pousser jusqu’à Victoria Falls via Johannesburg. Le nombre de places à réserver avec des miles étant très limité, nous avions acheté 10 mois plus tôt de façon à être sûrs d’obtenir des disponibilités. De toutes façons, South African Airways via Lufthansa ne sachant pas éditer de billets électroniques, nous étions obligés de recevoir des billets papier à Strasbourg avant de partir…

A l’époque, nous étions loin de nous douter que nous arriverions dans le pays à un moment charnière. En effet, la date des élections générales a été fixée par le gouvernement quelques mois plus tard. Comme par hasard, le jour de vote est le 29 mars alors que nous débarquons dans le pays le 01 avril.

Le pays est déserté par les touristes depuis des années en raison d’une grave crise économique et de mauvaises relations avec les anciens colonisateurs (le Royaume Uni), pas plus de violences qu’ailleurs mais des pénuries, de la pauvreté et une inflation galopante (+100000% par ans, mais pour nous ca ne signifie pas grand-chose). L’espérance de vie, SIDA aidant, est tombée de 60 à 34 ans pour les femmes et 37 pour les hommes mais les pays voisins sont dans la même situation – chiffres qui nous impressionnent d’autant plus que ce sont pile ou presque nos âges.

Nous commençons alors à chercher des informations sur le pays, pas facile de se faire une idée. D’un coté, les ministères des affaires étrangères français, britanniques et néo-zélandais jouent la sécurité « si vous le pouvez, n’y allez pas », de l’autre, les forums et blogs rédigés par des touristes sont moins catégoriques mais avec des niveaux de détail et de pertinence d’amateurs. Les médias zimbabwéens sont contrôlés par le pouvoir, les autres sont alignés derrière les britanniques et racontent tous la même chose depuis des années.

Le temps passe et les élections approchent avec leurs cortèges de mauvaises nouvelles : craintes de bourrage des urnes, intimidation des la part des militaires, Mugabe (28 années de pouvoir et pas décidé à se faire éjecter) qui souffle le chaud et le froid, crainte que la situation dégénère comme au Kenya, interdiction faite à certains pays de couvrir les élections sur place… d’ailleurs, avec nos airs de premiers de la classe en vadrouille, notre PC portable et nos appareils photos, ne vont-ils pas nous questionner à la douane ?

Comme toujours, dans l’ignorance, on se prend à imaginer le pire. Heureusement un échange de mails avec la patronne du lodge où nous prévoyons de loger nous rassure un peu, enfin quelques informations positives et de première main !

Les élections arrivent, le vote se fait dans le calme, un bon point. Là où les choses se gâtent, c’est que l’opposition semble avoir obtenu beaucoup de votes, peut être suffisamment pour renverser l’actuel président ce qui pourrait se traduire par quelque remous. La situation est telle que la commission électorale retarde la proclamation des résultats, faisant craindre une manipulation. C’est ce genre de temporisation qui a mis le feu aux poudres au Kenya.

Nous lisons ces derniers développements durant notre transit à l’aéroport de Sao Paulo (l’aéroport le plus déprimant du voyage), juste avant d’enregistrer notre vol transatlantique. Nous déciderons finalement d’y aller sachant que 1. Victoria Falls est une zone faiblement peuplée avec des risques d’émeutes moindres, 2. La ville est très proche de la Zambie et du Botswana où nous pouvons rapidement aller en cas de problèmes, 3. La ville est une zone touristique privilégiée qui fait entrer des devises dans le pays et doit en conséquence être bien sous contrôle.

Surprise à Johannesburg, nous terminons le voyage en première classe, l’avion est loin d’être plein mais avec une quarantaine de passagers on se dit que la ville n’est pas complètement désertée. Juste avant l’atterrissage nous apercevons la brume des chutes au loin.

Nous ne regretterons pas notre choix en arrivant dans la ville, pas de problèmes avec la douane, transfert impeccable (et trop climatisé), lodge accueillant, sécurisant et animé, ville pas si fantôme que ne le laissent croire les forums.

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